Les chasseurs de variants de la COVID-19 du Canada

Les variants préoccupants ont dominé les manchettes internationales pendant la pandémie de COVID-19. Une petite équipe d’employés du gouvernement du Canada, appelés agents techniques de liaison en génomique (ATLG), a joué un rôle déterminant dans l’identification et le suivi des variants au Canada. Ces experts travaillent directement dans les laboratoires de santé publique provinciaux et effectuent le séquençage du génome entier afin d’éclairer les interventions locales et nationales face à la menace en évolution.

Comme le virus SRAS-CoV-2 continue de circuler et de causer des infections, il pourrait subir des mutations, et de nouveaux variants pourraient apparaître. Il s’agit donc d’une préoccupation dynamique en matière de santé publique, d’où l’importance de surveiller l’évolution du virus. La capacité d’analyser les mutations génétiques a révolutionné la façon dont les scientifiques combattent les virus, y compris les scientifiques du Laboratoire national de microbiologie (LNM) de l’Agence de la santé publique du Canada.

Lorsque le premier variant préoccupant est apparu en décembre 2020, le séquençage génomique et la bioinformatique, soit les compétences requises pour traiter les données de séquençage, étaient des ressources limitées au Canada. Conscient des lacunes en matière de capacité, le gouvernement du Canada a investi 53 millions de dollars pour la mise en œuvre d’une stratégie de lutte contre les variants préoccupants afin d’intensifier rapidement le séquençage et les efforts scientifiques visant à détecter les variants connus et émergents du virus de la COVID-19, dont Omicron.

Présence sur le terrain

Afin d’établir rapidement une capacité nationale de séquençage, le LNM a travaillé avec les réseaux provinciaux et génomiques de santé publique pour déterminer les besoins régionaux dans chaque province. En plus d’acheter des fournitures de laboratoire, le LNM a collaboré avec les laboratoires provinciaux pour l’embauche d’experts en séquençage et en bioinformatique; ces experts sont des employés fédéraux sur le terrain qui travaillent conjointement avec leurs homologues provinciaux. Ce sont des ressources dédiées à renforcer le séquençage et la capacité scientifique en première ligne selon le moment et le lieu où cela est le plus nécessaire pour combattre les variants, et d’une manière qui répond aux besoins. (Pour en savoir plus sur le rôle du LNM dans le renforcement de la capacité nationale de dépistage de la COVID-19, cliquez ici.)

La capacité de séquençage sur place signifie que les échantillons n’avaient pas besoin d’être expédiés ailleurs au pays pour être séquencés. Avant ce programme, certaines provinces ne disposaient d’aucune capacité de séquençage génomique pour la surveillance de la santé publique. Dans d’autres provinces, le personnel de laboratoire était auparavant redéployé pour diagnostiquer les infections actives lors des pics des vagues de COVID-19.

Catherine Yoshida dirige l’équipe des ATLG (que l’on appelle officieusement « Gelatos » en anglais) avec trois coordonnatrices de projets scientifiques : Andrea Tyler, Geneviève Labbe et Ana Duggan.

Elle explique comment le fait d’avoir des experts en génomique sur place dans les laboratoires provinciaux augmente la capacité, ce qui permet de séquencer un plus grand nombre d’échantillons et de produire des résultats plus rapidement que jamais.

« Il n’a fallu que cinq jours, à partir du moment où nous avons reçu le premier signal d’un nouveau variant préoccupant de la part de la communauté scientifique internationale, pour que le variant Omicron soit détecté et que le Canada confirme ses premiers cas, ce qui a entraîné une intervention rapide en santé publique », explique Mme Yoshida. « La rapidité avec laquelle cela s’est produit était sans précédent et en dit long sur la capacité et le réseau que nous bâtissons. »

Créer des voies de communication

Ce ne sont pas seulement les résultats de laboratoire rapides qui se sont avérés essentiels, mais aussi les relations établies avec les laboratoires provinciaux. Kara Loos, une ATLG travaillant au laboratoire provincial Roy Romanow à Regina, explique qu’une partie du travail des agents consiste à créer des voies de communication et d’échange de connaissances.

« Chaque laboratoire est différent, et nous aidons à faire la liaison entre les laboratoires provinciaux et fédéraux. De plus, nous avons établi un réseau qui nous permet d’échanger des renseignements avec les autres membres de l’équipe et de réaliser des gains d’efficacité grâce à des processus de formation communs », explique Mme Loos.

La présence des ATLG a également permis au laboratoire d’allouer des ressources au diagnostic pendant les vagues Delta et Omicron tout en maintenant sa capacité de surveillance génomique.

« Les scientifiques fédéraux qui se sont joints à notre équipe ont apporté une expertise précieuse et contribuent à la durabilité du programme de surveillance génomique de notre province », a déclaré la Dre Jessica Minion, responsable clinique provinciale de la santé publique en médecine de laboratoire au laboratoire provincial Roy Romanow à Regina.

Pierre Lyons, un ATLG qui travaille à Moncton, au Nouveau-Brunswick, établit des relations entre les laboratoires provinciaux et les épidémiologistes locaux en travaillant directement avec eux en vue de mettre au point un système intégré au Nouveau-Brunswick. Il produit des analyses de séquençage qu’il communique aux épidémiologistes pour les aider dans la recherche des contacts, ce qui réduit considérablement le temps consacré aux enquêtes sur les éclosions et qui a aidé à contenir des éclosions.

Surveillance génomique au-delà de la COVID-19

Selon Mme Yoshida, l’équipe vise à tirer parti de la capacité de surveillance génomique acquise pendant la pandémie de COVID-19 pour améliorer et renforcer la surveillance d’autres maladies infectieuses, par exemple en intégrant la génomique à la surveillance courante de la tuberculose ou des agents pathogènes résistants aux antimicrobiens.

« La COVID-19 nous a permis d’explorer cette option à une échelle nettement plus grande. Elle a permis de cerner un besoin qui va au-delà de ce que nous avions la capacité de soutenir auparavant », explique Mme Yoshida.

Le LNM élabore actuellement un programme de formation en génomique et en bioinformatique afin de maintenir sa capacité et ses compétences dans ce domaine.

« Tout cela permettra d’approfondir l’expertise en génomique et en bioinformatique au Canada. Il ne s’agit pas seulement de trouver les talents, mais de les maintenir en poste et de les aider à se perfectionner à l’échelle nationale, et de suivre le rythme d’un domaine hautement novateur où la science et la technologie continuent d’évoluer », dit Mme Yoshida.