Des chercheurs d’Environnement et Changement climatique Canada constatent que les estomacs des phoques de l’Arctique n’accumulent pas la pollution par le plastique!

Beaucoup d’entre nous ont été touchés par les images des conséquences tragiques de la pollution par le plastique qui remplit l’estomac des animaux. La pollution par le plastique est un problème majeur dans de nombreux écosystèmes du Canada. Des articles antérieurs de « Dans les coulisses de la scène scientifique » révèlent l’étendue des quantités de plastique trouvées dans des oiseaux de mer, comme le Starique de Cassin, un oiseau présent dans l’océan Pacifique Nord.

Jennifer Provencher, chef de l’unité de santé de la faune au Service canadien de la faune (ECCC), était l’un des auteurs d’un article récent publié dans le Marine Pollution Bulletin. Elle a étudié le contenu des estomacs de phoques de l’Arctique chassés entre 2007 et 2019, et les résultats étaient surprenants.

Au cours des 15 dernières années, Mme Provencher a découvert des débris de plastique dans l’estomac de nombreuses espèces d’oiseaux de l’Arctique. Des travaux plus récents sur les additifs plastiques ont révélé la présence de contaminants chez les oiseaux de mer et les phoques (voir un exemple ici), amenant les chercheurs à penser qu’ils pourraient également trouver du plastique dans l’estomac des phoques de l’Arctique. Toutefois, à leur grande surprise, aucun des 142 estomacs de phoque qu’ils ont examinés ne contenait de particules de plastique de plus de 425 micromètres (la largeur d’environ quatre cheveux humains). Cette découverte est importante pour comprendre comment la pollution par le plastique peut toucher les ours blancs et autres prédateurs de niveau trophique supérieur.

L’article de la revue précise que contrairement aux oiseaux de mer arctiques de la même région, les phoques sont soit « moins exposés à la pollution par le plastique lorsqu’ils se nourrissent, soit ils n’ingèrent pas de plastique lorsqu’ils y sont exposés, soit ils ne retiennent pas les plastiques dans leur système gastro-intestinal » (p. 3) [traduction].

Une collaboration essentielle

Les chercheurs d’Environnement et Changement climatique Canada ont collaboré avec divers groupes de chasseurs et de trappeurs inuits. Ces groupes ont fourni des échantillons provenant d’un certain nombre de communautés du Nunavut - Arviat, Naujaat, Sanikiluaq et Iqaluit.

L’étude a été rendue possible grâce à des partenariats continus avec les chercheurs d’Environnement et Changement climatique Canada dans le Nord. Alors qu’ils espéraient recevoir 40 estomacs pour leurs recherches, ils en ont reçu plus de 140, dit Mme Provencher, « grâce à nos relations avec les chasseurs, les étudiants et d’autres chercheurs, nous avons pu obtenir rapidement les échantillons de manière collaborative ».

Les chasseurs inuits consignaient l’espèce, le sexe et les mensurations des phoques et en retiraient l’estomac. Les estomacs étaient ensuite expédiés au Centre national de la recherche faunique à Ottawa, où ils étaient disséqués et inspectés par des partenaires de l’Université Carleton afin de détecter la présence de matières plastiques.

Bien que les résultats soient une bonne nouvelle, la possibilité que les estomacs des phoques contiennent des microplastiques de moins de 425 micromètres (μm) n’est pas exclue. Cependant, les plastiques de moins de 425 μm sont moins préoccupants car ils sont moins susceptibles de s’accumuler dans l’estomac et donc de provoquer les effets négatifs risquant probablement d’être associés à la pollution par le plastique.

L’étude fournit une base de référence utile pour l’exploration future de la pollution par le plastique dans l’Arctique canadien, notamment pour d’autres travaux qui chercheront à comprendre comment les ours blancs sont exposés à la pollution par le plastique dans l’environnement, étant donné que les chasseurs inuits signalent des plastiques dans l’estomac des ours blancs au Nunavut.

Certes, il est toujours possible que les animaux ingèrent davantage de plastique à l’avenir, mais Mme Provencher se montre optimiste.

« Si nous pouvons empêcher la pollution par le plastique d’augmenter dans l’environnement, nous ne devrions pas assister à des changements négatifs », dit-elle.

Prochaines étapes

Selon Mme Provencher, il s’agit maintenant de communiquer les résultats aux communautés locales du Nord et de travailler avec elles pour tester d’autres espèces, comme les ours blancs, pour lesquelles les communautés et les chasseurs jugent préoccupante la pollution par le plastique.

Elle espère également voir les résultats prometteurs de l’Arctique de l’Est se reproduire dans l’Arctique de l’Ouest, et aussi dans la mer de Beaufort (nord des Territoires du Nord-Ouest et Yukon).

Dans les mois à venir, les scientifiques d’Environnement et Changement climatique Canada présenteront également les résultats au nouveau groupe d’experts sur les déchets et les microplastiques, créé par le Conseil de l’Arctique dans le cadre du Programme de surveillance et d’évaluation de l’Arctique (AMAP), et coprésidé par Mme Provencher. Le groupe d’experts élabore actuellement un plan afin de suivre les tendances de la pollution par le plastique dans le temps et l’espace dans l’Arctique.

Vous pouvez lire l’article complet dans le Marine Pollution Bulletin ici.

La carte montre l’emplacement et le nombre de phoques chassés et prélevés pour l’étude à différents endroits du Nunavut.

La carte montre l’emplacement et le nombre de phoques chassés et prélevés pour l’étude à différents endroits du Nunavut.