Candida auris : ennemi fongique

Quand vous avez contracté une infection causée par une bactérie, comme le streptocoque, il se peut que votre médecin vous prescrive des antibiotiques pour vous aider à guérir. Quand il s’agit d’une infection virale, comme la grippe, les médicaments antiviraux peuvent aussi être utiles. Ces types de médicaments s’appellent des antimicrobiens, parce qu’ils aident les gens à se rétablir d’infections causées par des microbes.

Or, saviez-vous qu’il existe un autre type de microbe qui peut rendre malade? Les champignons comme les moisissures et les levures peuvent causer toutes sortes d’infections allant du pied d’athlète à de graves infections du sang. La plupart de ces infections fongiques peuvent être traitées à l’aide d’antifongiques, mais comme c’est le cas de certaines bactéries, il semblerait que certains champignons deviennent résistants aux médicaments qui visent à les tuer.

Résistance aux antimicrobiens

Dans un laboratoire de recherche spécialisé du Laboratoire national de microbiologie (LNM) à Winnipeg, des scientifiques de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) étudient un champignon très sournois appelé Candida auris (C. auris). Contrairement à la majorité des champignons de la famille Candida, C. auris peut être multirésistant, c’est-à-dire qu’au moins deux types d’antifongiques n’ont aucun effet sur lui. C’est inquiétant parce que, pour le moment, seulement trois types de médicaments antifongiques sont utilisés.

C. auris peut être difficile à identifier et il faut procéder à des tests spécialisés pour confirmer sa présence. Il est surtout nocif pour les personnes dont le système immunitaire est déjà affaibli, comme les patients qui suivent un traitement contre le cancer ou des troubles sanguins. Pire encore, C. auris a tendance à survivre en milieu hospitalier, ce qui expose les personnes les plus vulnérables à un risque accru d’en être infecté.

C. auris au Canada

Depuis 2012, il y a eu 21 cas connus de C. auris au Canada. Plusieurs de ces cas étaient cependant associés à des voyages et n’ont pas pris naissance ici. Bien que le nombre de cas au Canada soit très peu élevé par rapport à d’autres pays, les signalements de ce champignon ont augmenté de beaucoup partout dans le monde au cours des cinq dernières années. Amrita Bharat (Ph. D.) est une scientifique du LNM qui étudie ce champignon traître. « À l’heure actuelle, les hôpitaux canadiens ont l’air d’être protégés. Il est donc impératif de continuer à créer des méthodes de détection et de traitement de Candida auris avant l’apparition d’autres cas », indique Mme Bharat.

Pour améliorer le diagnostic des infections à C. auris, les chercheurs du LNM collaborent avec les hôpitaux du Canada à l’élaboration de méthodes permettant de détecter le champignon avec précision et rapidité.

« Nous voulons donner aux professionnels de la santé les outils nécessaires pour diagnostiquer les infections sur place et réduire au maximum le risque d’infection chez les patients vulnérables. », souligne Mme Bharat. « L’objectif est d’aider le pays à être mieux préparé si jamais une éclosion survenait. »

L’ASPC est à la tête de deux réseaux qui facilite les communications au sujet de C. auris entre les laboratoires fédéraux, provinciaux et territoriaux et les établissements de soins de santé. Le Programme canadien de surveillance des infections nosocomiales (PCSIN) fait le suivi des maladies liées aux soins de santé et donne aux hôpitaux la possibilité de communiquer les uns avec les autres. Le Réseau des laboratoires de santé publique du Canada (CPHLN) offre aux laboratoires fédéraux, provinciaux et territoriaux la possibilité de faire de même.

Grâce à ces deux programmes, l’ASPC favorise les conversations sur les moyens de se préparer à C. auris afin que les scientifiques puissent mieux trouver la source et prévenir la prolifération des nouveaux cas. L’approche en amont de l’ASPC est essentielle pour protéger les Canadiens contre cet agent pathogène émergent.

« Le meilleur moyen de prévenir les infections à Candida auris est d’être aux aguets et d’être prêts », ajoute Mme Bharat. « Pour les professionnels de la santé, cela veut dire mettre en place un plan. Pour les patients, cela veut dire bien laver leurs mains et informer leur médecin s’ils ont été hospitalisés à l’étranger. »