Il commence à faire chaud ici! – Protéger les personnes plus vulnérables contre la chaleur extrême à l’intérieur

Le mercure augmente partout au pays et nous ne prenons pas souvent le temps de réfléchir aux effets que peut avoir la chaleur sur notre corps. La chaleur extrême à l’intérieur est particulièrement néfaste pour les personnes âgées et peut avoir des effets dévastateurs sur leur santé et même, dans certains cas, entraîner leur décès. Des chercheurs s’efforcent de comprendre ce phénomène et de déterminer comment mieux protéger les personnes les plus vulnérables.

Au Canada, en raison de nos hivers particulièrement froids, les maisons sont conçues pour retenir la chaleur. Cette caractéristique n’est pas idéale en cas d’événement de chaleur extrême, surtout pour ceux qui n’ont pas de climatiseur.

« Bon nombre des personnes touchées font partie des populations les plus vulnérables de notre société, comme les personnes âgées, mais aussi d’autres groupes, comme les personnes vivant avec une maladie mentale ou celles disposant de moyens limités pour se protéger », explique Paddy Enright, analyste des politiques à Santé Canada. « En outre, certaines personnes plus isolées sur le plan social n’ont personne pour s’occuper d’elles, ce qui fait qu’elles sont plus à risque de succomber à la chaleur extrême à l’intérieur de leur demeure. »

La science au premier plan

La fréquence et l’intensité des événements de chaleur extrême augmentent avec les changements climatiques. Par conséquent, nous devons veiller à ce que nos maisons soient bien adaptées pour y faire face.

Certains chercheurs s’efforcent de déterminer comment la chaleur affecte les gens et quels facteurs particuliers rendent certaines personnes plus vulnérables. C’est le cas du Dr Glen Kenny, directeur de l’Unité de recherche sur la physiologie humaine et environnementale de l’Université d’Ottawa, qui tente de déterminer quelles températures rendent les gens plus susceptibles de souffrir de problèmes de santé liés à la chaleur et de mourir à l’intérieur de leur demeure.

Au cours de la dernière décennie, l’équipe de laboratoire du Dr Kenny a mis au point des méthodes uniques pour mesurer les variations de chaleur dans le corps humain et déterminer comment celui-ci se refroidit naturellement. « Nous avons pu déterminer qu’en vieillissant, le corps perd progressivement sa capacité à évacuer la chaleur (principalement par la transpiration), ce qui fait qu’il retient plus de chaleur et que sa température interne augmente davantage lorsqu’il est exposé à des environnements chauds », explique le Dr Kenny.

Notre corps se rafraîchit naturellement grâce à la transpiration. Lorsque la sueur s’évapore de notre peau, elle entraîne avec elle une partie de la chaleur. Lorsqu’il fait trop humide à l’extérieur, la sueur ne fait que ruisseler sur notre peau sans rafraîchir notre corps, ce qui entraîne une augmentation plus rapide de notre température interne.

L’équipe de recherche du Dr Kenny a également constaté que les adultes plus âgées, ou ceux souffrant de maladies chroniques, ne perçoivent pas les effets de la chaleur ou n’y réagissent pas de la même façon que les personnes plus jeunes. En fait, les adultes plus âgés se disent moins sensibles à la chaleur, ce qui peut se traduire par une incapacité à percevoir la menace qui pèse sur leur santé lorsqu’ils sont exposés à une chaleur extrême. Ils courent donc un plus grand risque, car ils peuvent réaliser trop tard ce qui leur arrive.

Une exposition prolongée à des températures élevées à l’intérieur peut provoquer une sensation générale de malaise chez les adultes plus âgés. Leur tension artérielle peut chuter, soumettant ainsi leur cœur à un stress supplémentaire. Même en effectuant un geste simple, comme se lever d’une position assise, ils courent un plus grand risque de tomber et de se blesser.

Le Dr Kenny et son équipe de recherche se sont efforcés de déterminer des limites acceptables de température intérieure pour les personnes vulnérables en cas d’événement de chaleur extrême. Ils ont établi qu’une exposition d’une seule journée à des températures de 26°C est peu susceptible d’entraîner des problèmes chez les personnes âgées. Toutefois, la recherche montre qu’une exposition prolongée à des températures supérieures à 26°C mais inférieures à 31°C peut représenter un danger chez certains adultes. La recherche montre également qu’une exposition prolongée à des températures de 31°C ou plus doit être évitée chez les personnes sensibles à la chaleur.

Se protéger de la chaleur

Tout comme nous le faisons pour le froid l’hiver, il faut nous préparer à la chaleur lorsque la saison estivale arrive. Notre corps a besoin de temps pour s’habituer à la chaleur. Ce qui peut sembler torride pour une personne vivant dans une communauté nordique peut être perçu comme tout à fait confortable par une personne venant d’un pays où il fait plus chaud. La température n’est pas une mesure absolue du danger que peut représenter la chaleur. Écoutez votre corps et portez une attention particulière aux personnes plus vulnérables aux effets de la chaleur.

La climatisation demeure le meilleur moyen de rester au frais, mais il n’est pas donné à tout le monde d’y avoir accès à la maison. Pour ceux qui n’y ont pas accès, les municipalités offrent souvent des salles de rafraîchissement, ou recommandent aux gens de se rendre dans un endroit climatisé comme un centre commercial ou leur bibliothèque locale.

« Il est important de veiller à ce que les personnes les plus vulnérables puissent se rendre dans ces lieux, notamment en garantissant l’accès aux personnes à mobilité réduite », précise Paddy Enright. Et il ne faut pas oublier de s’occuper des personnes qui pourraient être plus isolées.

Par contre, le Dr Kenny souligne que les salles de rafraichissement ne sont pas toujours une solution efficace en cas de vague de chaleur prolongée. « Les salles de rafraichissement constituent un bon moyen de réduire temporairement la température corporelle, mais elle n’élimine pas toute la chaleur du corps. Lorsque vous êtes de nouveau exposé à la chaleur, votre température corporelle augmente rapidement pour revenir aux niveaux observés avant d’entrer dans une salle de rafraîchissement. » Donc même si vous vous sentez mieux, vous n’êtes pas complètement hors de danger.

Parmi les autres stratégies permettant de rester au frais, vous pouvez placer une serviette humide et fraîche dans la région du cou ou de l’aine. Vous pouvez aussi prendre un bain tiède (car l’eau froide peut provoquer un choc thermique qui peut être dangereux pour certaines personnes) ou tremper vos pieds dans de l’eau fraîche.

À long terme, nous devons aussi modifier la façon dont nos villes sont bâties. En effet, la température des noyaux urbains peut dépasser de plusieurs degrés celle des banlieues environnantes. Comme les bâtiments sont conçus pour durer, les décisions que nous prenons aujourd’hui pourraient avoir des répercussions pendant près d’un siècle.

« Compte tenu des connaissances acquises au moyen de la recherche, il n’y a aucune raison pour que des gens meurent de chaleur extrême au Canada, surtout à l’intérieur de leur demeure. Presque chaque décès dû à la chaleur est évitable. Nous pouvons agir afin d’assurer un avenir plus sain pour tous », conclut Paddy Enright.

Ressources supplémentaires

Événements de chaleur extrême : Comment se protéger des effets de la chaleur extrême sur la santé

Unité de recherche sur la physiologie humaine et environnementale – Université d’Ottawa