Roche-papier-chimie : Examiner l’exposition aux substances chimiques des enfants d’âge préscolaire

Cet article est le quatrième d’une série de cinq articles sur l’exposition aux substances chimiques pendant la grossesse et l’enfance. Pour plus de contexte, commencez ici.

 

Les chercheurs de l’équipe de l’Étude mère-enfant sur les composés chimiques de l’environnement (étude MIREC) cherchent à savoir si l’exposition à certaines substances chimiques pendant la grossesse peut avoir des effets sur le développement des jeunes enfants.

 

L’étude MIREC est une ambitieuse étude pluriannuelle des substances chimiques présentes dans l’environnement et de leurs possibles effets sur la santé des mères lors de la grossesse et tout au long du développement des enfants, de la petite enfance jusqu’à l’adolescence.

Dans cette étude, les chercheurs se sont penchés sur le neurodéveloppement d’enfants de 3 à 4 ans au moyen de tests de quotient intellectuel (Q.I.). Ils ont aussi cherché à savoir si l’exposition à des substances chimiques pouvait avoir une incidence sur l’obésité chez les enfants. Ce qu’ils ont trouvé les aide à établir des liens entre l’exposition aux substances chimiques et la santé plus tard dans la vie.

Capacités cognitives

Au cours des dernières années, les chercheurs de l’étude MIREC ont exploré les effets possibles de l’exposition des enfants aux substances chimiques, de même que les capacités cognitives des enfants.

Les capacités cognitives incluent entre autres l’attention, la mémoire, le raisonnement et la réflexion. Elles sont habituellement mesurées au moyen de tests de Q.I. D’autres tests peuvent fournir de l’information sur le neurodéveloppement d’un enfant par l’examen des traits autistiques chez l’enfant.

« L’étude MIREC n’est pas représentative de tous les enfants au Canada, puisque le choix de la participation revenait aux parents », explique le Dr Bruce Lanphear (doctorat en médecine [M.D.] et maîtrise en santé publique et en médecine tropicale [MPHTM]), professeur à la Faculté des sciences de la santé de l’Université Simon-Fraser. « Mais elle nous donne une idée du rôle des substances chimiques dans le développement des enfants. »

À titre d’exemple, les chercheurs ont constaté que même une faible exposition au plomb et à d’autres substances chimiques pourrait être associée à une baisse des résultats aux tests de Q.I.

Même si la différence entre les résultats aux tests de Q.I. se situe généralement entre 1 et 5 points pour chaque substance chimique, l’effet cumulatif de l’exposition à différentes substances chimiques peut être considérable.

Les chercheurs souhaitaient aussi déterminer s’il peut y avoir un lien entre les substances chimiques et les traits autistiques chez les jeunes enfants. Ceci ne signifie pas que les enfants recevraient un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme, mais qu’ils montrent des traits comme avoir de la difficulté à comprendre ce que d’autres personnes pensent ou ressentent, ressentir de l’anxiété en contexte social ou afficher un manque d’intérêt pour les autres.

Au cours de leurs recherches, les scientifiques de l’équipe de l’étude MIREC ont constaté qu’il pouvait avoir un lien entre l’exposition aux phtalates (substances chimiques utilisées pour la fabrication de plastiques) ou au plomb et des comportements autistiques. Ces traits étaient encore plus prononcés chez les enfants plus exposés.

« À partir d’études observationnelles de diverses organisations, nous sommes en mesure d’affirmer qu’il n’existe pas de concentration sans danger dans le sang des enfants », dit le Dr Lanphear.

Les chercheurs ont aussi constaté qu’une faible concentration d’acide folique pendant la grossesse était associée à une augmentation des traits autistiques.

Chez les enfants qui montraient plus de traits autistiques, des concentrations plus élevées de phtalates et de plomb ainsi que des concentrations moindres d’acide folique faisaient augmenter le nombre de traits autistiques, ce qui laisse à penser qu’il s’agit d’une situation plus complexe.

« C’est improbable que la cause de l’autisme soit une seule substance chimique, mais l’exposition cumulative à diverses substances chimiques », poursuit le Dr Lanphear. « L’influence réciproque entre les gènes et l’environnement entre aussi en jeu. »

Asthme

Les chercheurs ont trouvé chez les enfants des biomarqueurs qui pourraient permettre de prédire leur probabilité de développer de l’asthme ou des allergies au cours de leur vie.

Les chercheurs ont trouvé chez les enfants des biomarqueurs qui pourraient permettre de prédire leur probabilité de développer de l’asthme ou des allergies au cours de leur vie.

Pendant ses recherches doctorales, Jillian Ashley-Martin (doctorat en études interdisciplinaires [Ph.D.]), chercheuse scientifique et cochercheuse principale de l’étude MIREC, a trouvé dans le sang de cordon ombilical des indices, sous forme de biomarqueurs, qui pourraient prédire la probabilité qu’un enfant développe de l’asthme ou des allergies au cours de sa vie.

Il pourrait être plus facile pour une mère qui sait que son enfant pourrait être plus susceptible de développer ces problèmes de santé d’adapter son environnement pour réduire ses symptômes.

Sans surprise, les enfants dont les mères avaient elles-mêmes des allergies ou de l’asthme avaient davantage de ces biomarqueurs. Mais les chercheurs ont aussi constaté qu’une exposition plus élevée à la pollution de l’air pendant la grossesse augmentait aussi la quantité de ces biomarqueurs.

« Cela nous aide à établir le bien-fondé d’une réduction de l’exposition aux substances chimiques pour améliorer la santé des enfants », explique Mme Ashley-Martin.

Dans le cas de la pollution de l’air, les interventions doivent venir d’en haut, pas nécessairement des mères elles-mêmes. Il pourrait être nécessaire de réduire les concentrations de ces substances chimiques dans les collectivités.

Des recherches comme celle-ci fournissent de l’information aux décideurs et peuvent contribuer à guider leurs actions pour changer l’avenir.

Obésité

Les chercheurs ont aussi examiné l’incidence de l’obésité juvénile chez les enfants de 2 à 5 ans. Ils ont pris des mesures physiques, mais ont aussi étudié l’exposition aux métaux (p. ex. arsenic, cadmium, mercure, plomb) et à 22 types de phtalates différents.

« Puisque les enfants grandissent rapidement, il est difficile d’utiliser un seul ensemble de normes fondées sur l’indice de masse corporelle (IMC) pour les garçons et les filles d’âges différents », explique Mme Ashley-Martin. « Nous normalisons selon l’âge et le sexe, et nous examinons le lien entre l’exposition aux substances chimiques présentes dans l’environnement et l’IMC. Nous mesurons aussi l’IMC des parents dans le but de contrôler l’influence de la génétique. »

Les chercheurs ont observé des différences entre les garçons et les filles pour ce qui est du lien entre exposition au plomb et IMC. Il n’y avait pas de lien pour les garçons, tandis que chez les filles, celles qui étaient plus exposées au plomb avaient un IMC moindre. L’équipe travaille maintenant à mieux comprendre les différences sexospécifiques et à déterminer la différence entre les effets des substances chimiques présentes dans l’environnement sur les garçons et les filles.

Malgré certains résultats prometteurs, les chercheurs devront déterminer si le lien entre chaque substance chimique et l’obésité persiste au fil du temps jusqu’à l’adolescence et à l’âge adulte.


La recherche de l’étude MIREC est un élément clé du Plan de gestion des produits chimiques. Ce plan vise à réduire les risques que posent les produits chimiques pour les Canadiens et leur environnement par l’évaluation des produits chimiques utilisés au Canada et par la prise de mesures à l’égard des produits chimiques jugés dangereux pour la santé humaine ou l’environnement.

Ne manquez pas les autres articles sur les études MIREC aux différents stades de la vie des mères et de leurs enfants qui seront publiés au cours des semaines à venir.

À venir : Examen des effets de l’exposition aux substances chimiques chez les adolescents.

Pour en savoir plus :

Plateforme de recherche de l’Étude mère-enfant sur les composés chimiques de l’environnement (MIREC)

MIREC Canada