Lettre de la Conseillère scientifique en chef au Premier ministre et à la Ministre des Sciences, qui décrit les 100 premiers jours de travail.

Le 31 janvier 2018

 

Le très honorable Justin Trudeau
Premier ministre du Canada
Ottawa (Ontario)

et

L’honorable Kirsty Duncan
Ministre des Sciences
Ottawa (Ontario)

 

Monsieur le Premier Ministre et Madame la Ministre,

Je suis très heureuse de vous écrire en tant que votre conseillère scientifique en chef. Comme je suis en poste depuis maintenant 100 jours, je souhaite vous donner un aperçu de ce que j’ai fait, de ce que j’ai entendu et observé et de ce que je planifie faire au cours des prochains mois.

Je tiens d’abord à vous dire à quel point je suis reconnaissante d’avoir été accueillie aussi chaleureusement par autant de personnes. Le soutien inestimable apporté par le bureau de la ministre Duncan et le leadership assuré par Innovation, Sciences et Développement économique Canada m’ont permis de me mettre au travail rapidement. Je suis également reconnaissante envers le greffier du Conseil privé et les nombreux sous-ministres que j’ai rencontrés de l’appui qu’ils m’ont accordé et de m’avoir fait sentir la bienvenue parmi eux. Je les remercie aussi d’avoir assuré l’indépendance de mon bureau.

La communauté scientifique, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du gouvernement, ainsi que l’ensemble de la population, ont réagi très favorablement à la nomination d’une conseillère scientifique en chef, comme en témoignent la couverture médiatique étonnamment grande à laquelle nous avons eu droit et le fait que nous ayons reçu près de 1 000 lettres et notes de soutien. La démonstration de l’engagement du gouvernement à prendre des décisions fondées sur des données scientifiques et probantes a suscité un enthousiasme collectif dont j’entends tirer parti pour concrétiser deux éléments de mon mandat, c’est-à-dire promouvoir un dialogue entre les scientifiques gouvernementaux et universitaires et renseigner le public sur les enjeux scientifiques.

Au cours de mes dix premières semaines en poste, j’ai participé à plusieurs événements publics partout au pays et j’ai prononcé huit allocutions publiques. J’ai accordé 24 entrevues à des médias nationaux et internationaux (presse écrite, radio et télévision en direct). J’ai aussi parlé à des responsables de journaux étudiants et participé à des vidéos promotionnelles d’organisations à vocation scientifique. Au cas où vous ne seriez pas au courant, un sketch humoristique à mon sujet a été présenté lors de la populaire émission de la CBC This Hour Has 22 Minutes, ce qui illustre bien à quel point la nomination d’une conseillère scientifique en chef a su capter l’intérêt du public.

Dès le départ, j’ai largement consulté la communauté des chercheurs et des scientifiques à l’intérieur et à l’extérieur du gouvernement, lesquels étaient ravis du rétablissement du poste de conseiller scientifique en chef. J’ai aussi rencontré des groupes représentant des établissements et des organismes du milieu universitaire et de la société civile de partout au pays. Leur grand enthousiasme était accompagné d’attentes tout aussi grandes.

Pendant la mise sur pied de mon bureau, j’ai parlé avec mes homologues au sein des gouvernements du Québec, de l’Ontario et des territoires. Nous sommes tous impatients de travailler ensemble pour faire avancer la recherche, la formation et les politiques fondées sur des données probantes ainsi que consolider la place du Canada en tant que chef de file mondial dans ces domaines. J’ai aussi parlé à mes collègues internationaux chargés de produire des avis scientifiques aux États-Unis, en France, au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande et en Australie, et j’ai rencontré certains d’entre eux. Ils m’ont généreusement fait part de leur expérience et de leurs priorités, et ils m’ont assuré qu’ils désiraient resserrer les liens scientifiques avec le Canada.

Ici au Canada, j’ai rencontré certains de vos collègues au sein du Cabinet et leurs sous-ministres. De plus, j’ai visité plusieurs installations de recherche gouvernementales situées à Victoria, à Winnipeg et à Ottawa, et j’ai rencontré de nombreux scientifiques fédéraux. J’ai aimé prendre part à ces échanges fructueux desquels a transparu une grande volonté de collaborer.

J’ai aussi communiqué avec les membres du nouveau Comité de coordination de la recherche au Canada. En tant que membre de ce comité, je m’attends à entretenir un dialogue régulier et ouvert avec les conseils subventionnaires, la Fondation canadienne pour l’innovation et le Conseil national de recherches du Canada sur le renforcement de la capacité du Canada de garder sa place dans le paysage mondial de la recherche en évolution constante.

Cette consultation rapide m’a aidée à préciser ma pensée et à faire les observations suivantes :

  • Les scientifiques du gouvernement fédéral ont souligné l’importance d’accroître la collaboration entre les ministères et avec des partenaires du milieu universitaire et du secteur public. Ils sont impatients de présenter leurs travaux et de participer à la promotion de la science auprès du public. Je suis ravie qu’ils aient offert d’appuyer le mandat de mon bureau.
  • Le gouvernement a de plus en plus besoin de données scientifiques de divers ministères pour prendre des décisions. Il existe une certaine collaboration horizontale, mais il serait possible de la favoriser davantage en harmonisant les politiques et les lignes directrices ayant une incidence sur la recherche et en examinant les obstacles systémiques existants.
  • Les progrès scientifiques sont de plus en plus importants pour les ministères dans lesquels la science n’a pas toujours été très présente, comme Transports, Affaires mondiales et Justice, pour n’en nommer que quelques-uns. Dans le cadre de mon mandat et de mon engagement à examiner les mécanismes actuels qui permettent la livraison d’avis scientifiques, j’évaluerai le bien-fondé de la création d’un poste de conseiller scientifique (un scientifique en chef ministériel ou un poste équivalent) dans tous les ministères fédéraux.
  • Le rapport sur l’examen du soutien fédéral à la science fondamentale continue à retenir l’attention du milieu de l’enseignement postsecondaire et des scientifiques non gouvernementaux. Il y a de nombreuses raisons d’investir pour soutenir les activités scientifiques et de recherche, notamment pour favoriser le développement du talent, des compétences et de l’innovation.
  • Plusieurs pays ont des domaines de recherche stratégiques semblables aux nôtres, et ils font des investissements considérables pour attirer des employés talentueux et appuyer l’innovation. Heureusement, le contexte international est actuellement propice pour faire du Canada le chef de file en matière de science, et une destination attrayante autant pour les étudiants que pour les chercheurs. Saisir cette occasion pourrait apporter des avantages énormes à notre pays, des avantages qui se feraient sentir sur les générations à venir.

Chose certaine, j’ai beaucoup de travail à accomplir en tant que votre conseillère scientifique en chef. Au cours des prochains mois, j’ai l’intention de me concentrer sur les priorités ci-dessous :

  • Élaborer des politiques et des lignes directrices pangouvernementales sur l’intégrité scientifique de concert avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada.
  • Recommander des lignes directrices pour renforcer le cadre de communication afin que les scientifiques gouvernementaux puissent communiquer librement leurs travaux de recherche. Je suis bien placée pour comprendre à quel point cela est important autant pour les scientifiques que pour la population canadienne.
  • Contribuer à l’établissement d’un cadre scientifique ouvert pour faciliter l’accès du public aux activités scientifiques du gouvernement fédéral.
  • Examiner et recommander des améliorations pertinentes à apporter aux mécanismes d’avis scientifiques et aux processus décisionnels gouvernementaux existants.
  • Fournir des conseils sur la gouvernance et la gestion des infrastructures scientifiques importantes.
  • Appuyer le processus gouvernemental d’évaluation des répercussions sur l’environnement.
  • Préparer un rapport annuel sur les activités réalisées par mon bureau et l’état des activités scientifiques du gouvernement fédéral, et le présenter d’ici le mois de décembre 2018.

De plus, il pourrait être opportun d’envisager l’élaboration de feuilles de route nationales concernant la science et la recherche dans un ou plusieurs domaines de première importance pour le Canada, comme la science des données, la recherche dans l’Arctique ou la médecine régénérative et de précision.

Enfin, et surtout, il est particulièrement important d’incorporer le savoir autochtone dans les données scientifiques sur lesquelles le gouvernement fonde ses décisions. Il s’agit d’un engagement de votre gouvernement auquel je souscris. Je serais heureuse, avec mon équipe, de vous aider à cet égard.

En conclusion, les trois derniers mois ont été intenses et stimulants, et j’ai été touchée par le vaste appui que le public a témoigné envers mon bureau. Je suis reconnaissante de votre confiance et du dialogue ouvert et constant instauré avec vous et vos bureaux. J’ai hâte d’accomplir le travail qui m’attend et de vous fournir des conseils afin que les activités scientifiques du Canada continuent à se développer et qu’elles procurent tous les avantages possibles aux Canadiens. 

Je vous prie d’accepter, Monsieur le Premier Ministre et Madame la Ministre, mes meilleurs vœux pour l’année 2018.

 

Mona Nemer, C.M., C.Q., MSRC
Conseillère scientifique en chef